vendredi, octobre 16, 2015

La vérité sur l'affaire Harry Québert-- Joël Dicker

La légèreté de cette lecture est tombée à point nommé après mon voyage au gré de la route sombre de Ma Jian.
C'est une lecture plaisir, le genre de livres qu'on ne veut pas lâcher, le suspense est tel qu'on a peur qu'au bout du compte, il n'y ait rien à découvrir.
J'ai justement eu du mal à parler de ce livre parce que, prise par sa lecture je l'ai terminé en plein milieu d'une nuit, je n'ai pas pu en parler juste après l'avoir achevé.

Ce n'est pas LE livre incontournable, il ne révolutionnera pas votre quotidien. L'intrigue tient debout certes, elle est assez bien ficelée pour vous tenir sur plus de huit cents pages, ce qui n'est pas rien, mais elle est tout de même un peu flottante. On y croit parce qu'on veut y croire. Faut dire que ce roman brasse énormément de choses - tellement que beaucoup ne sont que trop légèrement traitées.
Ça n'empêche que la balade est plaisante.

L'histoire est celle d'une Lolita qui finit encore plus mal que celle de Vlad, une Lolita ravagée de l'intérieur,
un peu plus âgée aussi pour que ce soit un tout petit moins choquant peut-être. Nola avait disparu depuis plus de trente ans, son corps est retrouvé au début du roman. Nola était aimée par l'un des plus grands écrivains des Etats-Unis, qui devient de fait suspect numéro 1. Son élève, le jeune, talentueux et couard, Marcus Goldman entreprend de faire lumière sur ce terrible drame et de disculper son maître à écrire.
Passons les réflexions un peu plan-plan sur la littérature, il y a tout de même un vrai questionnement métalittéraire sur ce qu'est "écrire".  Pour moi, c'est plus un autoportrait de l'écrivain en tant que jeune raté ; toute critique négative que je pourrais faire à l'encontre de ce livre est déjà dans ses pages. L'auteur, Joël Dicker a une réelle prise de distance sur son travail, sur son statut, sur son ethos.
Et puis, il y a ces moments si drôles, des scènes dignes des moments les plus comiques de Belle du seigneur, des portraits caricaturaux, des scènes où la petite bourgeoisie (l'esprit de bourgeoisie, j'entends) est tournée au ridicule, comme ce passage où la patronne d'un diner de province prépare ses filles à recevoir LE grand écrivain new-yorkais.
Ce roman est aussi celui du double, de la mise en miroir, tout se réfléchit et c'est parfois vertigineux.
J. Dicker a quand même le talent de nous emmener à peu près là où il veut, si tant est qu'on accepte de faire semblant.
J'ai aussi adoré l'impression de lire de l'américain traduit. C'est très étrange comme sensation, de savoir que c'est écrit dans la langue de l'écrivain et pourtant de se confronter à un décalage. Ce n'est pas comme lire du Senghor ou tout autre écrivain francophone mais d'une autre culture, c'est vraiment l'expérience de décalage ressentie à la lecture d'un livre traduit.

Joël Dicker se mesure aux grands, à Vladimir Nabokov, à Philip Roth, à Albert Cohen, il s'en inspire même sans s'en cacher, et tout ça sans prétention, sans pédantisme. C'est innocent, ça t'embarque et ça fait du bien.

Une lecture chouette !
Et puis, mince, on veut savoir ce qui est arrivé à cette NOLA.


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