dimanche, juin 30, 2013

Tolstoï ---- Anna Karénine

Je n'ai noté aucune phrase de ce roman, je n'en ferai aucune citation ou alors je serais bien obligée de recopier les neuf cent quatre-vingt cinq pages. Chacune des phrases prise seule ne vaut pas grand chose, c'est leur orchestration qui est belle.  J'avais plusieurs fois entendu parler de cet auteur, bien sûr, du roman russe en général, bien sûr, mais pourquoi ne m'a-t-on pas tout simplement dit, au lieu de toutes les remarques snobs, que lire un roman de Tolstoï, c'est avoir les joies du cinéma et de la littérature en même temps ; c'est lire un livre en  couleurs, et en musique ?

La composition est simple, mais si génialement simple qu'elle donne le vertige. L'on suit plusieurs histoires entrelacées, dans la société russe aristocratique. On y trouve des mariages, des tromperies, de la séduction, de la morale, et surtout de la morale romanesque (une contradiction en somme). L'auteur nous raconte un événement en adoptant le point de vue d'un personnage, puis nous le raconte de nouveau avec le point de vue d'un autre ; flux et reflux où se reflètent toutes les subtilités psychologiques des individus.
Vous avez sûrement déjà entendu/lu l'incipit :
 " Toutes les familles heureuses se ressemblent mais chaque famille malheureuse l'est à sa façon ."
Tout de suite, on est pénétrés par la simplicité du style ; une simplicité que seul un esprit de génie peut concevoir. Le bonheur familial, est toujours le même au bout du compte   maman qui fait un gâteau, papa qui coupe du bois... tandis que le malheur nous offre des possibilités kaléidoscopiques. Pourtant Anna est malheureuse parce qu'elle n'aime pas son mari, puis elle est malheureuse parce qu'elle pense que Vronski ne l'aime pas, alors que Kitty a été malheureuse en pensant que Vronski ne l'aimait pas, Lévine a été malheureux pensant que Kitty ne l'aimait pas et Dolly est malheureuse parce que son mari ne l'aime pas et ... Bref, leur malheur se ressemble. Or l'incipit annonce  une sorte d'illustration de cette péremption, comme un conte à rebours puisque la morale nous est donnée dès le début. Mais à mesure de la lecture, en se rappelant cette première ligne, on se demande s'il ne faut pas remettre en question ce postulat. L'idée serait en effet que les familles heureuses sont heureuses parce qu'il y règne amour, joie, simplicité, petite maison à la campagne,

Il y a donc là une seule alternative possible : ou bien Tolstoï introduit son roman de façon ironique, ou bien il a posé une hypothèse existentielle et le roman, parce qu'il découvre des vérités là où son auteur n'avait fait que les sentir, a fini par prouver le contraire.

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